Seattle, le 12 février 2071. Voilà 10 jours que l’alerte aux pluies acides a été déclarée, préoccupant autorités publiques et médias. Unes et Editions Spéciales, jusqu’alors monopolisées par les violentes controverses et émeutes ayant suivi la récente découverte des Technomanciens et autres Intelligences Artificielles, titrent désormais sur les problèmes inquiétants de Santé publique induits par les intempéries, à la grande satisfaction des actionnaires de DocWagon, d'ailleurs. Embourbée dans un hiver et une dépression climatique sans fin, rongée par la paranoïa endémique de sa population, la ville-Emeraude semble avoir définitivement perdu de son éclat. Le malaise ambiant et insidieux semble toucher toutes les classes, tous les esprits, comme si tout le monde avait l’intuition de la venue imminente d’une catastrophe encore inconnue et plus mortelle que la précédente… Tout le monde ou presque, car cette atmosphère délétère, c’est justement le pain quotidien des habitants des Barrens. Vivant le chaos et l’anarchie tous les jours depuis un demi-siècle, le district des Redmond, au contraire, semble comme « épargné" par cette morosité générale, autant que peut l’être une tumeur cancéreuse sur un corps en pleine hémorragie. C’est dans ce quartie…
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Bla… Bla… Bla… Plein l’fion de cette vieille soupe qu’on nous rabâche sur les Redmond. Les Barrens, c’est là qu’ça s’passe, mec. Là où tout est possible… surtout dès que ça concerne l’oseille.. et donc le vice. La vraie vie, en somme… Quoi ? Qu’est-ce t’as? La misère te saoule, c’est ça ? Tu préfères te pignoler sur la vie dorée de ces enfoirés d’corpos ? Tu veux vivre chez les peigne-culs dans une cage de verre climatisée tout confort, avec tes crédits que tu ne finiras jamais de payer, tes patrons que tu ne finiras jamais de lécher, et ta meuf qui ne finira jamais de baiser ton banquier ? Alors dégage, mec. C’est pas à toi que j’m’adresse. Non, mon pote. Je parle à ceux qui en ont, ceux qui font pas dans leur froc dès qu’ils voient une patrouille de Knight. Parce que les héros de la putain d’histoire que j’vais raconter, c’est ce qui s’est fait d’mieux dans les Ombres, depuis bien des années…
Ah, ben j’voix que ça t’intéresse du coup… Tu vois, t’es p’têt’ moins burne que t’en as l’air. Les gars dont j’vais te causer, frérot, c’est du pur jus d’la rue, des modèles pour beaucoup d’entre nous, avec leurs forces et leurs galères. Et des galères, crois-moi, ils en ont connues. Et j’peux même dire qu’ils ont eu grave chaud aux miches, les keums. Ils en ont bavé, tous autant qu’ils sont, mais aujourd’hui les jeunes du coin répètent leur nom et rêvent de leur ressembler. Et pas qu’les jeunes d’ailleurs. Les apprentis runners comme toi, aussi, rêvent de faire ce qu’ils ont fait. Et ouais, mon pote ! Et tu veux savoir pourquoi ? Parce qu’ils sont les preuves vivantes que ce putain d’quartier est tout sauf les chiottes de l’humanité comme ils le pensent tous. Tu piges ? Alors assis-toi bien, mec, et ouvre grand les oreilles car une histoire comme celle-là, tu l’entendras pas souvent.