LE PANTHEON CORPORATISTE
Même si le paysage corporatiste a toujours été et sera toujours changeant, les mégacorporations telles que nous les connaissons en 2070 sont toutes clairement identifiables depuis les années 40. C’est à cette époque qu’elles commencèrent à renforcer leurs identités respectives pour devenir les géants monolithiques dans l’ombre desquels nous vivons depuis 2033. Chacune des dix « classée AAA » détaillées plus loin fait partie de la cabale corporatiste qui mène la danse, plus connue sous le nom de Cour corporatiste.
ARES
Tout commence avec Damien Knight. Personne n’avait jamais entendu parler de lui jusqu’à ce qu’il réalise « l’Acquisition éclair » de 2033, après quoi son nom était sur toutes les lèvres. À l’aide d’une petite merveille de programmation réalisée à Stockholm, en Suède, il réussit à prendre le contrôle de 22 % des parts d’Ares Industries et à défier son PDG, Leonard Aurelius, pour prendre le contrôle de la corpo. Certains affirment qu’il aurait accompli cet exploit avec l’aide du grand dragon
Dunkelzahn, d’autres disent que Knight n’est autre que l’ancien leader d’Echo Mirage, David Gavilan, sorti de l’ombre après être resté planqué un moment. Quelle que soit la vérité, personne ne peut contester que Damien Knight est un requin corporatiste talentueux, parce qu’il est toujours en place.
FUCHI
L’année suivante, une société de Boston du nom de Matrix Systems produit et commercialise le premier cyberterminal vendu sur le marché semi-légal, « Portal ». Les fondateurs, Ken Roberts et Michael Eld, font partie des survivants d’Echo Mirage et ont utilisé leurs connaissances pour développer une version portable de l’équipement utilisé lors du combat contre le virus. Ils ne vivront cependant pas assez longtemps pour profiter du fruit de leur labeur : tous deux trouvent la mort dans de mystérieux accidents. Richard Villiers, un boucanier corporatiste qui a acheté 49% de leur compagnie, se retrouve seul propriétaire. Il envoie toutes les données concernant les Portals ainsi que plusieurs exemplaires à une compagnie du nom de Fuchi Industrial Electronics et exige un tiers des parts en échange d’une cession totale de tout le matériel. Korin Yamana et Shikei Nakatomi, les autres actionnaires, acceptent à contrecoeur, et c’est ainsi que Fuchi commença sa percée exceptionnelle sur le marché des cyberdecks. Mais cette décision fut également la source d’années de luttes intestines au sein de la corpo, semant en fait les graines de sa propre destruction.
SAEDER-KRUPP
Il était une fois une compagnie du nom de BMW qui constituait la pièce maîtresse de l’empire Saeder-Krupp. Une femme très intelligente le dirigeait, Wilhelmina Graff-Beloit. Elle s’en était emparée en le prenant à son fondateur (et accessoirement, son mari). En 2037, il se passa quelque chose qui pourrait être à l’origine de la devise « Ne traite jamais avec un dragon » : le grand dragon Lofwyr annonça que par divers biais, il contrôlait 63 % des actions de la compagnie et en prenait donc la présidence. Il jeta Mina dehors, qui s’exila en 2050 à bord de la station Zurich-Orbital jusqu’à sa mort, puis se débarrassa du conseil d’administration et remania complètement la direction. Par des manoeuvres de génie, Lofwyr agrandit encore l’empire Saeder-Krupp, l’envoyant tout droit dans la cour des grands et des corporations AAA.
Le dragon vit heureux depuis.
YAMATETSU
Affublée d’une réputation de parvenue et de révolutionnaire (expliquant sans doute pourquoi elle s’est renommée « Evo »), Yamatetsu Corporation occupa le devant de la scène en 2041, au grand dam de tous. Ces malotrus étaient déterminés à obtenir un siège à la Cour corporatiste et n’acceptaient pas qu’on les refoule. Comment osaient-ils ?
C’est en tous cas ce que se disaient les autres corpos, quand Yamatetsu réussit, en 2042, le tour de force de se hisser au rang de AAA dans un gigantesque pied-de-nez. Ils ont dû lâcher du lest en permanence, en se séparant des membres les plus rétrogrades de la compagnie, et ils se sont adaptés pour rester à la pointe de la technologie afin de s’attaquer sous
un nouveau nom, Evo, à divers projets transhumanistes.
RENRAKU
À l’origine appelée Keruba International, Renraku fut rebaptisée après le Crash de 29 lorsqu’un jeune loup corporatiste du nom d’Inazo Aneki en fit l’acquisition et la restructura complètement. La corporation joua un rôle clé dans la reconstruction du réseau mondial après le Crash et en tira des profits considérables. Mais elle voulut se faire plus grosse que le boeuf en commençant à faire joujou avec la création de logiciels cognitifs semi-autonomes, en 2049 : bien que cela ait donné à la corpo une bonne longueur d’avance dans la course technologique (et la prise de parts de marchés), son application à la Renraku Arcology de Seattle aboutit à une IA démente, Deus et un rôle dans le Second crash.
AZTECHNOLOGY
Aztechnology prit une très mauvaise décision quand elle donna l’ordre à l’Aztlan de nationaliser toutes les compagnies étrangères. Cette déclaration de guerre économique poussa la Cour corporatiste à mandater son tout premier « Ordre Oméga » : en gros, un feu vert pour que toutes les autres corpos s’en prennent sans modération au condamné. Il fallut quelques années aux mégacorpos pour préparer leur riposte, mais elles le firent avec classe : en 2048, l’opération
Reciprocity, menée conjointement avec le soutien de la Cour corporatiste, frappa les installations d’Aztechnology à Ensenada. AZT s’empressa de revenir à la table des négociations et le Règlement de Veracruz força la mégacorpo à verser des compensations directes à toutes les compagnies lésées. Pendant les négociations, d’une manière ou d’une autre, la mégacorpo s’arrangea pour que seules les autres mégas puissent établir des filiales en Aztlan et pour que les actionnaires
majeurs de ces filiales soient des citoyens aztlans ou des corporations majoritairement contrôlées par des Aztlans. Tordu, hein ? Cela ne fait que montrer à quel point ils vous suceraient le sang… au sens propre comme au figuré.